Fermeture d’un terminal portuaire à Ningbo, désorganisation du fret aérien à l’aéroport de Shanghaï
La fermeture du 3e port maritime du monde à la mi-août en Chine, après qu’un travailleur a été testé positif au COVID-19, a désorganisé le transport maritime mondial, extrêmement malmené depuis le début de la crise sanitaire. L’an dernier, 1,2 milliard de tonnes de marchandises ont transité par les quais de ce port, et le terminal en question en traite 25 %. Près de 2.000 salariés ont été mis à l’isolement, au moment où les chaînes d’approvisionnement mondiales étaient déjà à flux tendu. Les restrictions sanitaires ont été levées seulement 2 semaines plus tard, le terminal devant être pleinement opérationnel au 1er septembre, faisant craindre que tous les navires en Chine ne soient retardés de 14 à 21 jours.
Au début de l’été déjà, le terminal Yantian de Shenzhen avait réduit sa production de 70% pendant un mois, perturbant fortement l’ensemble de la chaîne d’approvisionnements. Il avait fallu un mois supplémentaire pour que les activités du quatrième port du monde reviennent à la normale.
De nouvelles infections à coronavirus à l’aéroport de Shanghaï les 20 et 21 août ont aussi amené les autorités chinoises à suspendre les opérations des avions cargo, annuler des vols, et détourner le fret sur d’autres aéroports. Près d’un millier d’employés ont été testés après que 5 cas ont été détectés. La liste des compagnies aériennes affectées au Pudong Air Cargo Terminal (PACTL), plus grand aéroport de fret de Chine, est longue: Hong Kong Airline, Atlas, Etihad Cargo, Air China, Polar Air, Cathay Pacific, FedEx, American Airline, Ethiopian Airlines, Lufthansa Cargo, Eva Air Cargo, Qatar Airlines, etc. Le processus de dédouanement a été affecté, entraînant de “sérieux retards”. On a assisté à une hausse des prix du fret aérien et une pression accrue sur les chaînes d’approvisionnement en redressement.
La stratégie “Zéro Covid” de la Chine
La Chine applique une tolérance zéro vis-à-vis de la circulation du virus, avec verrouillage des frontières aux passagers et réaction très précoce au moindre cas. Dès le premier cas détecté, toute la zone est fermée pour détecter les nouveaux malades et de isoler. Début août, 31 provinces et villes chinoises, dont Pékin et Wuhan ont ainsi été “bouclées”. Chaque fois, la production est retardée et cela entraîne un allongement des délais de livraison.
Si le bilan sanitaire, social et économique de cette stratégie est jugé très positif pour la Chine, ses conséquences sont lourdes pour le transport international de marchandises, et impactent les chaînes d’approvisionnement jusque créer des ruptures sur certaines matières premières et sur les produits qui sont fabriqués en Chine ou y transitent : les jouets, les pièces détachées pour l’automobile, les batteries électriques ou les semi-conducteurs électroniques par exemple.
Les effets combinés de la crise sanitaire sur le transport maritime
Les perturbations du fret maritime mondial avaient atteint des niveaux critiques en mars 2020, puis se sont superposées à d’autres effets de la crise sanitaire:
- une production ralentie par des fermetures d’usine sporadiques en Chine mais aussi en Inde, au Bangladesh, au Vietnam…
- une forte demande en “rattrapage” des 18 mois précédant, en Europe et aux Etats-Unis.
- Une pénurie inhabituelle de conteneurs et d’espace disponible pour transporter des produits de l’Asie vers l’Occident, qui se répercute par effet domino depuis le début de la crise sanitaire en mars/avril 2020: voir notre explication en vidéo au JT de France 3.
- Des pénuries de matières premières et de main d’oeuvre, et un manque d’espace sur les cargos et dans les terminaux maritimes.
La pandémie a provoqué de nombreux déséquilibres dans la chaîne d’approvisionnement, aggravant le phénomène de congestion portuaire dont souffrent les acteurs de la filière conteneurisée et certains ports chinois pour leurs flux à l’export. Les conditions détériorées ont entraîné une hausse importante des taux de fret en 2021.
Une hausse sans précédent des taux de fret conteneurisé
Le PDG d’Hasbro Brian Golder a expliqué par exemple que “en moyenne, le prix du fret maritime [pour ses jouets] est environ quatre fois plus cher qu’il y a un an“. L’ensemble des flux sortants sont affectés.
Selon Drewry Shipping, qui surveille les prix du fret maritime à l’échelle mondiale, le coût d’expédition d’un conteneur de 40 pieds sur huit des principales routes de l’Est a atteint 9 613 dollars, soit une augmentation de 360% par rapport à l’année dernière. La plus forte hausse de prix a été enregistrée sur la route maritime entre Shanghai et Rotterdam, aux Pays-Bas, où le coût a augmenté de 659%.
L’index du prix du transport maritime au départ de Shanghaï illustre cette hausse phénoménale depuis mars/avril 2020 sur les différentes routes.
Index du Shanghaï Shipping Exchange reflétant la hausse du prix du fret conteneurisé sur les différentes routes maritimes au départ de Shanghaï. Source et crédit : Shanghaï Shipping Exchange
Alors que nous avions autrefois une pléthore de conteneurs attendant d’être transportés, nous nous retrouvons aujourd’hui face à une avalanche de retards et de frais. Toute opération maritime est actuellement confrontée à une inertie terrible. Ce n’est pas le moment de défaire et refaire les commandes, les évènements s’en chargent. Jusqu’à quand allons-nous faire face à ces taux de fret délirants et subir un service erratique des shipping lines ? Nul ne le sait. Ce que l’on sait en revanche, c’est que l’organisation des transports maritimes n’a jamais été aussi complexe. Ne croyez pas les vendeurs de rêves, il n’y a pas de solutions miracles, il n’y a que des gens qui se battent pour assurer le service – et MATHEZ FREIGHT se fait fort d’être l’un d’eux.
Nous vivons une époque sans précédent. Malgré des décennies d’expérience en matière de logistique et de connaissance du marché, aucun d’entre nous n’a jamais vu une telle situation se produire d’un seul coup.
Dégradation des conditions de transport aérien
La situation du fret aérien est également dégradée. Les principaux aéroports chinois ayant appliqué une règle de “gestion en circuit fermé” en raison de l’augmentation des cas de coronavirus, la vitesse de traitement des exportations est de 30 à 40 % inférieur à la normale et les marchandises importées doivent faire l’objet d’inspections très strictes. Les annulations de vols de fret ont également un impact sur les taux de fret aérien.